Lost in the swell – Des vagues pour Noël…

Aurel, Ewen et Ronan ont passé Noël à Santa Isabel, une île très peu peuplée au nord ouest de Malaita. Pour les fêtes, le Pacifique leur offre une des plus belles houles que les Salomon n’aient jamais connu. Ewen raconte.

« Sur Santa Isabel, la plupart des villages sont à l’intérieur des terres, sur les hauteurs. Avant l’arrivée des missionnaires, au 16ème siècle, les hommes de différents villages se battaient entre eux. A l’époque, ils payaient des guerriers « les head-hunters » qui arrivaient par la mer et coupaient les têtes de tous les villageois qui étaient proches du bord de mer. Depuis, culturellement, ils préfèrent habiter sur les hauteurs. Aujourd’hui, on ne trouve donc rien en bord de mer. Nous marchons donc chaque jour jusqu’au milieu des terres à la recherche de bananes, ananas et papayes, que nous trouvons d’un jardin à l’autre. L’opération peut parfois nous prendre jusqu’à 6 heures.

Avant de partir, Aurel et moi avons surfé le beachbreak devant le petit village. Et ça a fini en cours de surf avec les gamins ! C’était fou de voir leur aisance dans l’eau malgré la violence de certaines vagues. La plupart se sont d’ailleurs mis debout dès la première vague. Quand ils sont petits, ils jouent beaucoup dans les vagues avec des espèces de mini bodyboard en bois qui ont la forme de bateaux. Mais c’est étrange, ils passent toute leur enfance dans l’eau et dès qu’ils grandissent ils n’y mettent plus un pied.

Cette semaine, on savait qu’il y avait une houle très nord/nord-ouest qui allait rentrer. Du coup, on a navigué pendant 2 jours vers le nord-ouest de l’île. Il y avait peu de vent et nous avons navigué au portant, sous spi.

Santa Isabel est l’île la moins peuplée de tout l’archipel. Plus on monte vers le nord, moins il y a de monde. La côte est super vierge et c’est magnifique ! Il y a plein de petites îles vierges et de grosses forêts à l’intérieur. Et les récifs….il sont fabuleux ! A chaque fois qu’on s’est arrêté à côté d’une île et que j’ai lancé un leurre, tout de suite, un poisson mordait ! c’était assez dingue. On a pu attraper des gros mérous et des maquereaux.

Nous avons rencontré le premier cachalot mort de notre vie. Une vraie expérience olfactive… même en naviguant au large, nous étions gênés par l’odeur…ça sentait vraiment la mort (rires) ! On s’est approché par curiosité, il avait d’énooooormes morsures de requin tout partout sur les flancs et le sang rougissait le sable.

Ce jour là on a fait 35 miles de navigation, On a voulu s’arrêter sur une île vierge mais on ne savait pas trop où mouiller. Ça n’avait pas l’air facile et il y avait pas mal de vent. On est tombé sur un mec qui était tout seul sur sa pirogue en train de pêcher autour de l’île. Après avoir discuté en pidgin (moi et nono on commence à devenir bons !), il nous a invité à dormir dans son village. Du coup on l’a invité à bord et on a attaché sa pirogue au bateau. Le vent a un peu forci sous les grains : il devait y avoir 20/25 nœuds et le bateau filait à 8-9 nœuds ! Le gars a halluciné car ça ne faisait pas de bruit et ça allait vite. Et il avait l’impression de voler. Il arrêtait pas de dire « so fast so fast ».

Il était tout sourire et c’était un peu l’expérience de sa vie. Dans la conversation, à force de discuter avec lui on a compris que c’était le chef du village. Donc c’était pratique, on l’avait déjà de notre côté. Sauf que dans un virement pour rentrer dans la passe et aller dans la mangrove, il y avait tellement de vent que la pirogue s’est renversée. Du coup elle a pris l’eau et toute sa pêche, ses clopes et ses noix de cocos sont parties à l’eau. Donc il a fallu aller chercher un par un tous les trucs qu’il avait déjà pêché.

L’accueil était super dingue. Quand on est arrivé dans la mangrove, les gens sont venus avec des grosses pirogues nous voir sous la pluie. On leur a offert notre mérou qu’ils ont cuit à la locale. C’était délicieux. Aurel et moi avons dormi chez l’habitant et Ronan a dormi à l’intérieur du bateau.

Le lendemain on a mis les voiles cap au nord ouest. En chemin, on est tombé sur une grande barrière de corail sans passes qu’on a dû contourner. Il y avait près de 2000 m de fond. L’endroit propice pour croiser des baleines, des dauphins et des tortues ! Les dauphins étaient faciles à approcher mais les baleines c’était beaucoup plus compliqué. On a traîné un peu pour le plaisir et on est reparti pour arriver sur l’île de Papaturaa Faa. A l’entrée de la seule passe qui était indiquée sur la carte, on a trouvé une super vague, une droite, pas très longue mais super creuse avec un gros tube, on était tout fous ! Avec Aurel, nous étions prêts à nous jeter à l’eau quand le moteur nous a lâché. Impossible de le démarrer et de rejoindre la pic. La vague tourne et rentre à l’intérieur entre deux bouts de corail. Pour la voir, il faut être super près du corail… Du coup on a remis les voiles et on est reparti un peu plus au large.

Il n’y avait pas beaucoup de vent, on s’est énervé sur le moteur qu’on a fini par démonter. Ronan a essayé de démonter la bougie mais le truc ne voulait rien savoir. A ce moment là, le câble du panneau solaire a pris feu faisant un énorme court-circuit, Ronan avait déjà remarqué que le panneau solaire ne marchait pas très bien… Il a sauté dessus et a réussi à virer le truc qui était en train de cramer. Du coup on était sans moteur, avec le câble tout oxydé/cramé dans les mains. Du coup on a glandé pas mal et on a vu des péchous  dans la passe et on les a appelé. Ils ont fini par venir nous voir. Ils nous ont remorqués pendant une demi heure à l’intérieur du lagon. Ils nous ont présenté une famille d’australiens qui avaient tout ce qu’il fallait pour réparer le moteur et les panneaux solaires. Extra !

Depuis hier, la fameuse houle est arrivée. C’est le swell de l’année, il y a plus de 2 mètres et 20 secondes de période. La vague est puissante, super creuse et à sec sur le reef…et bien sûr, elle ferme sur la fin. J’ai chopé le tube de ma vie sur une vague de près de 3 mètres. Par contre, Aurel s’est pris la série de l’année sur la figure. Résultat : un gros bleu et quelques égratignures sur le dos. La houle est prévue pour les 4 prochains jours et il y a pleins de spots autour de nous. C’est un super cadeau de Noël !”. Ewen